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Si l’observation depuis la Terre a pu révéler le grand nombre et la diversité des petits corps du système solaire, seule leur exploration in-situ permettra de répondre aux questions qu’ils soulèvent aujourd’hui sur leur composition physique et chimique. Cela explique la recrudescence de missions dédiées aux petits corps (Osiris-Rex, Hayabusa-2, Mars Moon Explorer, etc.) ainsi que les efforts déployés par les agences internationales (DLR, NASA, JAXA) pour permettre l’exploration de leur surface. De par leur faible gravité (entre 10-6 et 10-2 g) les astéroïdes (e.g. Eros), les comètes (e.g. Churyumov-Gerasimenko) et les petits satellites (e.g. Phobos) se révèlent des candidats difficiles pour une mobilité de surface. En milligravité (i.e. autour de 10-3g), le poids très faible d’un véhicule ne permet des tractions que 1,000 fois plus faibles que celles dont bénéficient les rovers martiens et lunaires. Surtout, le comportement du régolithe des petits corps est peu compris et donc difficile à prévoir, notamment à cause du rôle majeur joué par les forces de cohésion à ces échelles de gravité. Le comportement du régolithe tient alors davantage à celui d’une poudre cohésive comme la farine qu’à celui d’un gravier fin. Cette thèse explorera donc la faisabilité et la performance attendue d’un véhicule à roue à la surface d’un petit corps. L’étude reposera sur la modélisation du sol par méthodes à éléments discrets (DEM). Cette approche consiste à simuler l’interaction détaillée des grains de régolithe un-à-un (friction, résistance au roulement, cohésion, etc.). A partir d’un code DEM préexistant (e.g. ESyS-Particle) qui sera identifié au commencement de l’étude, la thèse examinera et implémentera les modifications nécessaires à apporter pour modéliser les interactions spécifiques d’une roue avec le régolithe d’un petit corps. L’étape de modélisation franchie, la thèse appliquera l’outil développé à la résolution du problème du roulage : traction et manœuvrabilité (simplifiée) dans différents types de régolithe, à différents niveaux de gravité. Les travaux seront conduits avec l’ISAE-Supaéro : l’encadrante est une experte du régolithe des petits corps, des méthodes DEM ainsi que du développement d’expériences (vols paraboliques, tours de chute) permettant la validation des simulations numériques. Au terme de la thèse, nous aurons répondu aux questions suivantes : quelle est la force de traction que l’on peut attendre d’un régolithe en milligravité ? comment cette traction évolue-t-elle quand la gravité change ? comment la cohésion du régolithe affecte-elle l’écoulement autour de la roue ? Ces réponses nous permettront de déterminer le seuil de gravité minimum, selon le régolithe attendu, en dessous duquel le roulage devient impraticable ou trop inefficace pour être préféré à d’autres solutions (e.g. les « hoppers » Mascot (DLR), Hedgehog (JPL) ou Minerva (JAXA)). Les missions vers les petits corps constituent des opportunités de collaborations inter-agences très intéressantes et abordables en coût et en complexité. La compétence sur la locomotion en milligravité peut se révéler cruciale pour participer en tant que partenaire à ce genre de mission. C’est également un domaine de coopération actif entre le CNES (à DSO/DV/IF) et le DLR (à Oberpfaffenhofen) qui a déjà une certaine expérience dans le domaine avec leurs outils de simulation multi-corps et leurs outils de modélisation DEM. Cette thèse consoliderait l’axe d’étude et cette coopération.